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Behçet (maladie de)

Rédigé par David SAADOUN, service de Médecine Interne et d’Immunologie Clinique, Centre national de référence des maladies autoimmunes et systémiques rares, DHU I2B, inflammation, immunopathologie, biothérapie, UPMC, Paris VI, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris (juin 2014)

 

Qu’est ce que la maladie de Behçet ?

La maladie de Behçet est une maladie liée à l’inflammation des vaisseaux sanguins. Elle se manifeste essentiellement par des aphtes dans la bouche ou sur les organes génitaux, mais également par une atteinte des yeux, de la peau, des articulations, du système nerveux et des veines (occlusions) ou des artères. Une fatigue très prononcée est également présente.

 

Est-ce une maladie fréquente ?

La maladie de Behçet est plus ou moins fréquente selon l’origine géographique. Elle est plus fréquente chez les patients venant de Turquie, d’Afrique du Nord ou du Japon (historiquement la « route de la soie »), alors qu’elle est nettement plus rare en Europe (sauf dans le bassin méditerranéen) ou dans les pays nordiques.

 

Quelles sont les personnes atteintes par la maladie de Behçet ?

La maladie de Behçet touche principalement les personnes jeunes entre 15 et 45 ans. Elle peut aussi bien toucher les hommes que les femmes.

 

Est-ce une maladie contagieuse ?

Non, la maladie de Behçet n’est pas une maladie infectieuse et n’est donc pas contagieuse.

 

Est-ce une maladie héréditaire ?

Non, la maladie de Behçet n’est pas une maladie héréditaire. Il existe de rares cas familiaux (5% des cas), suggérant qu’il existe une prédisposition génétique. Notamment, un certain sous-type des molécules HLA [molécules du « soi » présentes sur les cellules de l’organisme permettant de distinguer les cellules du soi de celles d’un autre organisme] l’HLA B51 est associé à la maladie. Il est très peu probable que son enfant développe la maladie au cours de sa vie quand on est soi même atteint de la maladie de Behçet.

 

A quoi la maladie de Behçet est-elle due ?

La cause de la maladie de Behçet n’est pas connue. Cependant, nous savons que les personnes malades ont, pour des raisons multiples encore imparfaitement comprises, un défaut de régulation de leur système immunitaire, menant à l’activation de certains globules blancs (les lymphocytes) et à l’infiltration des vaisseaux et des organes par ces cellules qui sont à l’origine de l’inflammation constatée.
 

Quels sont les symptômes ?

 

Les aphtes buccaux

Les symptômes les plus fréquents sont les aphtes au niveau de la bouche (98% des patients), qui doivent être fréquents pour être pathologiques. Ils sont souvent volumineux et  douloureux. Ils évoluent par poussées. Cependant, tout aphte n’est pas forcément synonyme d’une maladie de Behçet. Les aphtes génitaux sont fréquents même s’ils sont le sont moins que les aphtes buccaux.

 

Les atteintes oculaires

Les atteintes oculaires font toute la gravité de la maladie car elles touchent environ 60% des patients avec un taux de cécité de 10-15%. Elles sont responsables d’une inflammation de l’œil, de sa portion antérieure (uvéite antérieure) ou postérieure (uvéite postérieure) ou de la rétine (vascularite rétinienne). Les principaux symptômes sont une baisse de la vision, une douleur de l’œil ou une rougeur oculaire.

 

Les atteintes articulaires

Les atteintes articulaires sont également possibles même si plus rares. Elles sont responsables surtout de douleurs articulaires et plus rarement de gonflements des articulations (arthrites). Les grosses articulations (genoux, chevilles…) sont les plus fréquemment touchées.

 

Les atteintes neurologiques

La maladie de Behçet peut atteindre également le système nerveux central avec une inflammation au niveau des méninges (enveloppe entourant le cerveau) responsable d’une méningite ou une inflammation du tissu cérébral. Des atteintes des vaisseaux avec une occlusion d’une veine cérébrale (thrombophlébite cérébrale) sont également fréquentes. Ces atteintes peuvent être responsables de maux de tête, de troubles de la conscience, d’une confusion (désorientation), d’une atteinte des nerfs crâniens (paralysie des muscles de la face, troubles de la motricité des yeux, troubles de déglutition…), d’épilepsie, ou d’un déficit de la force musculaire…

 

Les atteintes des vaisseaux

Au cours de la maladie de Behçet, les gros vaisseaux peuvent également être le siège d’une inflammation (on parle alors d’angio-Behçet). Cette inflammation se traduit par une occlusion (caillot) d’une veine qui peut se situer au niveau des membres inférieurs, du ventre ou de la tête. Les thromboses peuvent se manifestent pas des douleurs, une augmentation du volume de la partie du corps atteinte (jambe, ventre…)

Les artères de plus gros calibre (aorte, artères des poumons...), peuvent soit s’occlure ou se dilater (anévrysme) avec un risque de rupture, complication très grave mais très rare de cette maladie (responsable de saignements). L’atteinte des vaisseaux des poumons, notamment, se traduit par une toux et des expectorations contenant du sang (hémoptysie) et constitue une urgence médicale.

 

Comment en faire le diagnostic ?

Il n’y a pas de test spécifique afin de faire le diagnostic avec certitude. Le diagnostic repose donc sur un faisceau d’arguments incluant la présence d’aphtes buccaux et/ou génitaux, une inflammation de l’œil, une atteinte neurologique ou une inflammation des vaisseaux. La présence de plusieurs de ces atteintes ci-dessus rend le diagnostic de maladie de Behçet possible, probable ou certaine en fonction du nombre d’atteintes présentes. Plus le nombre de critères ci-dessus est élevé plus le diagnostic est probable. Le diagnostic d’atteinte neurologique ou des vaisseaux se fait en utilisant les moyens d’imagerie comme les scanners (TDM) ou imageries par résonance magnétique (IRM) des zones malades. Les analyses de sang donnent également des renseignements précieux afin de mettre en évidence l’inflammation dans le sang (augmentation des globules blancs, baisse des globules rouges et élévation de la protéine C activée) témoin de l’inflammation  dans les différentes parties du corps.

 

Y a-t-il un dépistage de la maladie de Behçet ?

Il n’y a pas de dépistage de la maladie de Behçet.

 

Quelle est son évolution ?

 

L’évolution de la maladie de Behçet se fait par poussées entrecoupées de périodes d’accalmie (rémissions).

Les poussées sont d’intensité variable d’une personne à l’autre de même que chez une même personne, l’intensité varie d’une poussée à l’autre. Elle semble également plus sévère chez l’homme que chez la femme. Au fil du temps, la maladie a cependant tendance à diminuer d’intensité. Les handicaps qui peuvent en résulter sont surtout dus à l’atteinte neurologique et à celle des yeux, dont le pronostic est sévère. La maladie peut parfois dans de rares cas être mortelle (5% des cas environ) en raison de l’atteinte des vaisseaux, du système nerveux ou d’une infection.

 

Quel en est le traitement?

 

Le traitement anti-inflammatoire

Il n’y a pas de traitement à l’heure actuelle qui guérisse définitivement cette maladie. Cependant, les traitements disponibles à l’heure actuelle permettent de contrôler la maladie. En revanche, il existe un risque de rechute de la maladie à l’arrêt des traitements, qui explique la nécessité de poursuivre une surveillance en consultation au long cours.

L’objectif des traitements de la MB est de diminuer l’inflammation d’où l’utilisation de traitements anti-inflammatoires puissants. La décision du type du traitement anti-inflammatoire dépend de la gravité de la maladie.

Les formes cutanées et muqueuses nécessitent en première intention de la colchicine, très efficace pour le contrôle des aphtes et les douleurs articulaires. La dose dépend de l’efficacité et de la tolérance du traitement. Les principaux effets secondaires sont la diarrhée, parfois l’élévation des enzymes du muscle et rarement la diminution de certaines cellules du sang comme les globules blancs.

Pour les formes cutanéo-muqueuses plus rebelles, nous pouvons être amenés à utiliser des faibles doses de corticoïdes et plus rarement du thalidomide. Le thalidomide peut être responsable de neuropathies et est formellement contre-indiqué pendant la grossesse.

Les formes plus graves de la maladie, comme une atteinte oculaire sévère (de la partie postérieure de l’œil responsable d’une baisse de la vision), une atteinte du système nerveux ou des artères, nécessitent le plus souvent un traitement plus lourd. Des fortes doses de corticoïdes sont utilisées par voie orale et parfois en intraveineux (dans les veines). Ils permettent de diminuer rapidement l’inflammation. Cependant, ils peuvent avoir des effets secondaires (hypertension, prise de poids, diabète, baisse du potassium dans le sang, infections, ostéoporose, troubles du sommeil et de l’humeur, cataracte…). Leur utilisation nécessite donc des précautions d’emploi pour éviter de tels effets secondaires : un régime alimentaire adapté pauvre en sucres et en sels, une supplémentation en potassium, en calcium, la vérification de l’absence d’infections avant de démarrer le traitement…). 

Pour pouvoir diminuer les corticoïdes sans présenter une rechute de la maladie, l’emploi d’immunosuppresseurs est souvent utile dans ces formes de la maladie. Nous sommes amenés à utiliser le cyclophosphamide (Endoxan®), utilisé par perfusions intraveineuses tous les mois pendant plusieurs mois puis relayé par d’autres immunosuppresseurs par voie orale comme l’azathioprine (Imurel®) ou mycophénolate mofétil (Cellcept®). Parfois, on peut utiliser ces médicaments par voie orale d’emblée. Ces médicaments ont tous comme point commun d’augmenter le risque d’infections, d’où la nécessité de consulter rapidement en cas de fièvre ou de symptômes évocateurs d’infections pour instaurer le traitement adapté rapidement. L’Endoxan® peut également présenter une toxicité sur la vessie (cystite) et être responsable de nausées, d’une baisse des globules blancs, mais aussi une diminution de la fertilité.

Enfin, dans certaines formes oculaires sévères, l’Interféron alpha peut être employé en injections sous-cutanées. Ses principaux effets secondaires sont une fièvre, un syndrome pseudo grippal, une fatigue, des troubles de la thyroide, une baisse des cellules du sang comme les globules rouges, les globules blancs…

Enfin, des traitements plus récents comme les anticorps anti-TNF alpha sont de plus en plus utilisés dans les formes sévères de la maladie ou les formes résistantes aux traitements précédents. Ils sont dirigés contre le TNF alpha pour empêcher son action et donc diminuer de façon drastique l’inflammation. Il faut obligatoirement éliminer une tuberculose latente avant de débuter le traitement. Son principal effet secondaire est de favoriser les infections. Ils peuvent rarement aggraver des problèmes cardiaques chez des patients âgés ayant une insuffisance cardiaque sous-jacente.

Les traitements locaux notamment dans les formes oculaires peuvent être très utiles (collyres à base de corticoïdes associés à des collyres pour dilater la pupille afin d’empêcher les complications de l’uvéite).

 

Le traitement des thromboses

Les occlusions des veines ou artères se traitent par des médicaments fluidifiant le sang pour éviter que l’occlusion se majore.

 

Observance (prise des médicaments)

Même si les notices des médicaments peuvent être impressionnantes, il est important de noter que le choix d’un traitement repose sur une évaluation précise des besoins du malade par le médecin spécialiste. Il est donc nécessaire d’avoir confiance en ses choix et de suivre le traitement prescrit. Il est vraiment essentiel pour contrôler la maladie et éviter les récidives, de bien suivre le traitement prescrit et ne pas oublier de prise. A fortiori il ne faut jamais arrêter le traitement sans accord de son médecin.

 

Que peut-on faire soi-même pour se soigner ?

 

Il est recommandé d’arrêter de fumer car le tabac risque d’aggraver les troubles vasculaires.

Aucun régime alimentaire spécial n’est nécessaire pour la maladie de Behçet. Cependant, la prise de corticoïdes, notamment à fortes doses, doit s’accompagner d’un régime pauvre en sucres et en sels. De plus, quand il y a une atteinte digestive importante, des régimes appropriés peuvent être conseillés par le gastroentérologue.

Dans le cas où des douleurs articulaires, la pratique d’exercices d’intensité modérée, en dehors des poussées, peut aider au maintien de la souplesse des articulations et de la force musculaire.

 

Un soutien psychologique est-il nécessaire ?

La maladie de Behçet est une maladie chronique avec des manifestations cliniques cutanées, oculaires, articulaires qui peuvent causer un handicap dans la vie quotidienne à cause des douleurs, de la baisse de la vision… Par ailleurs, toute maladie chronique nécessite un suivi au long cours, la prise de médicaments quotidienne avec une nécessité d’une bonne observance… Tous ces éléments peuvent engendrer une anxiété et altérer l’image de soi. Un soutien psychologique peut aider pour aider à mieux accepter sa maladie et la vivre au mieux au quotidien.

 

Peut-on avoir des enfants quand on a la maladie de Behçet ?

On peut avoir des enfants quand on a une maladie de Behçet. Il est cependant important que le médecin spécialiste donne son accord pour démarrer une grossesse. Dans la majorité des cas, il n’y a pas d’aggravation de la maladie pendant la grossesse sauf dans 20% des cas. Il est donc conseillé de débuter une grossesse quand  la maladie est contrôlée. Par ailleurs, certains médicaments sont contre-indiqués pendant la grossesse, donc certains médicaments doivent être interrompus parfois même plusieurs mois avant la grossesse. Il est donc indispensable de programmer la grossesse avec son médecin pour modifier le traitement si besoin. Il faut également avoir une contraception efficace pour l’emploi de certains immunosuppresseurs.

Il n’y a pas d’augmentation des complications obstétricales chez les patientes avec une maladie de Behçet. Il ne s’agit pas d’une maladie héréditaire. On retrouve quelques cas exceptionnels de Behçet néonataux mais résolutifs quelques semaines après la naissance.

 

Quelles sont les informations à connaître et à faire connaître en cas d’urgence ?

 

Tout personnel soignant doit être informé de l’existence de la maladie de Behçet, des organes atteints ainsi que du traitement éventuel en cours. Ces précautions permettent d’éviter des associations potentiellement dangereuses de médicaments incompatibles. Informer tout nouveau médecin de l’existence de la maladie de Behçet permet de reconnaître rapidement certaines complications de la maladie et y apporter le traitement adéquat.

 

Peut-on prévenir la maladie de Behçet ?

Nous ne pouvons pas prévenir la maladie de Behçet.

 

Comment se faire suivre ? 

Les patients avec une maladie de Behçet doivent se faire suivre par une équipe spécialisée dans un service de médecine interne.

 

Existe-t-il des associations de malades ?

Oui, les patients peuvent également rentrer en contact avec l’association française Maladie de Behçet (AFBehçet) par mail: afbehcet@gmail.com.

 

Où en est la recherche?

Les équipes spécialisées de chercheurs et de médecins réalisent de nombreux travaux de recherche qui visent à mieux comprendre la maladie afin à terme de bénéficier de traitements spécifiques de la maladie de Behçet, de plus en plus efficaces.

 

Peut-on avoir une prise en charge à 100% ?

La maladie de Behçet, dans les formes graves et/ou compliquées, peut donner le droit à l’exonération du ticket modérateur (prise en charge à 100%). S’il existe un handicap lié à la maladie, des prestations de compensation du handicap et une carte d’invalidité peuvent être également obtenus. Selon la situation, il faut en discuter avec son médecin pour réaliser les démarches nécessaires.

 

Pour obtenir d’autres informations sur cette maladie, contactez Maladies Rares Info Services au 01 56 53 81 36 (appel non surtaxé) et www.maladiesraresinfo.org